Les élus se fédèrent…
Depuis quelques mois déjà, et de manière plus soutenue, depuis quelques semaines, les élus locaux s’inquiètent des impacts des grandes infrastructures de transports ferroviaires à grande vitesse (LGV) qui vont traverser leurs communes.
Ce mouvement s’observe de plus en plus dans le grand sud-ouest français.
Après les regroupements en Poitou-Charentes on voit les communes du nord-Gironde prendre conscience du danger que représentent les LGV pour la survie de leur habitat, de leurs aménagements industriels ou commerciaux, de leurs espaces naturels.
C’est ainsi qu’en réponse aux visées technocratiques de RFF, et aux incertitudes quant à la tenue des engagements de l’Etat par le concessionnaire choisi pour la construction de la LGV Tours-Bordeaux, pas moins de 14 communes du nord-Gironde[1] se sont regroupées récemment au sein de la FECTI-LGV Gironde.
Cette fédération, déclarée sous forme d’association en décembre 2010, a pour objet de « défendre les intérêts des communes traversées et impactées par la ligne à grande vitesse Sud Europe Atlantique et leurs habitants ; œuvrer auprès du concessionnaire pour limiter les nuisances qui peuvent être engendrées par les travaux liés à la construction de cet équipement ».
Ce positionnement stratégique indique bien que les élus de cette fédération n’entendent pas refuser la LGV mais plutôt gérer au mieux son passage sur leurs territoires. Ce faisant ils s’organisent pour être des interlocuteurs incontournables face à RFF, LISEA et aussi aux institutionnels (Préfet, Région, CUB…), qui sont tous au cœur des mécanismes de décisions tant pour le financement du projet LGV que des dispositions d’accompagnement (indemnisations par le FST[2], organisation des travaux, infrastructures routières, protections phoniques…).
Les médias ont largement rapporté les difficultés rencontrées par ces élus locaux pour obliger RFF, via les contributeurs financiers territoriaux (CUB, Conseil Général, Conseil Régional…), à la prise en compte des dispositions minimales d’accompagnement de la LGV dans leurs communes.
Reste aujourd’hui, après un point d’étape important validé avec le président de la CUB, à espérer que les dispositions convenues soient entérinées par le concédant (RFF) et le concessionnaire (LISEA) quand les travaux commenceront en Nord-Gironde.
Plus près de nous, en Sud-Gironde, un processus similaire vient d’être engagé (mimétisme anticipé avec l’exemple du Nord-Gironde ?) par un certain nombre d’élus.
C’est ainsi qu’un Collectif GPSO Sud-Gironde prend corps sous l’impulsion d’élus (maires, conseillers généraux…) qui entendent « tout mettre en œuvre pour protéger les biens et les personnes des territoires traversés » par les GPSO.
Si ce Collectif reconnaît « regretter en conséquence la décision de réalisation des Grands Projets du Sud-Ouest, en son fond et sa forme » et en contester le principe même, il constate que le temps du refus simple des GPSO est passé.
Ceci l’amène à proposer une Charte aux élus regroupés dans ce collectif, charte qui décrit les grands axes de leur action vers les institutionnels (Etat, RFF…) où l’on peut souligner, par exemple :
- d'identifier les problématiques communes à l'ensemble des territoires traversés
- de porter collectivement les exigences consécutives à cette identification, aux fins de prise en compte par l'Etat et RFF
- de constituer une cellule de veille juridique, économique, environnementale, quant aux conséquences des GPSO
- ….
Si l’on ne peut qu’être d’accord pour que nos élus locaux s’organisent suffisamment tôt pour défendre les territoires, et leurs habitants qui sont leurs mandants, on se doit, principalement au sein des associations, d’être prudents et attentifs quant aux manœuvres que ne manquera pas de mettre en place RFF pour limiter les mesures d’accompagnement indispensables aux GPSO (respect des zones d’habitat, protection des zones naturelles, limitation des nuisances phoniques…).
Nous regrettons toutefois que le Collectif constitué n’aille pas au bout de son constat d’inutilité publique des GPSO, quand il dit « regretter en conséquence la décision de réalisation des Grands Projets du Sud-Ouest, en son fond et sa forme », car il pourrait encore aujourd’hui lutter[3], avec les associations, pour obliger l’Etat, RFF, la Région Aquitaine, la Région Midi-Pyrénées…à renoncer aux LGV et à aménager les voies existantes.
Au-delà de ce regret nous espérons que le Collectif prendra en compte l’implication des habitants des territoires traversés par les GPSO dans la lutte pour leur défense.
Notant qu’il entend agir « en complémentarité des initiatives existantes ou à venir, menées sur des territoires infra-géographiques » et aider dans « l'expression populaire et citoyenne lors de l'enquête publique », nous relevons cette intention et y mettons notre espérance pour qu’elle soit appliquée dans les faits par un lien indispensable qu’il faut attendre entre le Collectif et les associations.
Jean-Robert Thomas – 22 février 2011
[1] La FECTI –LGV-GIRONDE (Fédération des élus des communes traversées et impactées par la ligne à grande vitesse Tous-Bordeaux en Gironde) regroupe les communes d’ Ambarès, Saint Loubes, Saint Vincent de Paul, Saint Romain la Virvée, Cubzac les Ponts, Saint Antoine, Aubie et Espessas, Peujard, Gauriaguet, Laruscade, Cavignac, Marsas, Cézac.
[2] Le Fond de Solidarité Territoriale (FST) est une réserve financière mise en place par circulaire du 27 septembre 2010 en application de la loi n°2009-967 du 3/08/2009 (article 12) visant à améliorer l’insertion environnementale de la nouvelle infrastructure, en dehors de l’emprise ferroviaire et au-delà des obligations réglementaires qui s’imposent au maître d’ouvrage, et à mettre en valeur les territoires traversés, notamment en favorisant leur développement économique.
[3] Rien n’est encore irrémédiable. RFF n’est encore qu’à l’étape d’étude des tracés des GPSO. La procédure d’enquête d’utilité publique n’est prévue qu’en 2013 et la DUP fin 2014. Par ailleurs, et d’ici là, il faudra trouver les quelques 15 milliards d’euros minimum pour financer les GPSO en plongeant les mains dans les poches des collectivités territoriales qui sont sous coupe réglée de l’Etat qui se désengage de plus en plus de ses fonctions primordiales dans le secteur des transports, de la santé, de l’éducation, de l’assistance sociale…