L’agriculture/viticulture victime des Grands Projets Inutiles Imposés(GPII)
Nous étions conviés ce vendredi 30 novembre 2012 par Bérengère QUELLIEN de GRANVILLIERS, adhérente de LGVEA et propriétaire viticultrice du Château LUSSEAU sur Ayguemorte-les-Graves, à nous joindre à la visite de José BOVE, eurodéputé d’Europe Ecologie les Verts.
Petit retour sur l’artificialisation des terres
Cette visite s’inscrivait dans la critique générale de l’artificialisation des terres agricoles qui découlent de l’expansion continue des Grands Projets Inutiles Imposés (GPII) tels qu’aéroports, autoroutes, lignes ferroviaires à grande vitesse (LGV)…
Ces dernières constituent en effet un danger immanent pour le maintien de l’activité agricole et viticole dans le grand Sud-Ouest où le GPSO[A], s’il était mené à terme, en sacrifiant des milliers d’hectares de terres pourtant si nécessaires pour l’alimentation locale des populations. Avec une emprise de l’ordre de 7 à 10 hectares au km, ces LGV devraient donc constituer une prédation de plus de 3000 hectares de terres jusqu’alors réservées à l’agriculture, à la viticulture, à la sylviculture, et de manière plus générale à notre environnement naturel en butte à l’artificialisation continue depuis des décennies.
Le Commissariat au Développement Durable relevait d’ailleurs en 2011 que cette artificialisation des terres françaises entre 2000 et 2006 s’était faite au détriment des terres agricoles pour prés de 90%, soit pour une surface de 745 km².
Même si un décret récent découlant de loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche permet la création de Commissions départementales de la consommation des terres agricoles la régression de l’espace agricole français est loin d’être stoppée jusqu’à présent.
Comme le rappelait La Tribune.fr encore récemment ce sont 26m² de terres agricoles qui disparaissent en France chaque seconde !
Le Ministère de l’Agriculture lui-même faisait état de la disparition de 82000 hectares de terres agricoles par an en moyenne entre 2006 et 2010 ce qui équivaut à 65 fois la surface d’une commune comme Saint Médard d’Eyrans ou d’un département comme la Marne ou la Saône et Loire.
Résister au plan local
Nous nous sommes donc retrouvés sur la propriété de Madame QUELLIEN de GRANVILLIERS en présence de José Bové (eurodéputé EELV), Marie Bové, Monique de Marco, Bernard Perré (conseillers et conseillères régionales EELV), des élus du Front de Gauche, les maires d’Ayguemorte-les-Graves (J.P. Sourrouille) et de Léognan (B. Fath), des sympathisants associatifs.
Pour les associations, outre notre présence, on notera la présence des représentants de l’ACCRIL venant des Landes.
Les quatre membres du Conseil d’Administration de LGVEA présents ont pu aborder les différentes problématiques découlant du GPSO sur le territoire de l’Arruan, et au-delà, tel que le résume le document (voir http://sd-5.archive-host.com/membres/up/8889538985686605/Docs_LGVEA/Visite_EELV_30_novembre_2012.doc) préparé à ce propos et en s’appuyant sur la carte (voir http://sd-5.archive-host.com/membres/up/8889538985686605/docs_gene/Carte_problematique_viticole_Arruan.doc) du territoire viticole local autour de Château Lusseau.
Malgré différentes assertions des représentants de l’Etat, de RFF, et de diverses personnalités ces dernières années nous confirmons que le milieu viticole AOC des Graves et de Pessac Léognan serait impacté, directement ou indirectement, au-delà d’une seule propriété ou d’une seconde « quelque peu écornée » : c’est en fait une dizaine de propriétés sur une quinzaine de km au sud de Bordeaux et près de 100 hectares comme le soulignait encore Jean-Louis Vivière[B] du Syndicat Viticole des Graves dans les colonnes du journal Bordeaux Gironde Actu.
L’emprise finale du tracé LGV étudiée par RFF évolue encore à l’intérieur du fuseau adopté par le Premier Ministre en mars 2012 mais il est clair que la plateforme supportant les deux voies de la LGV ne sera pas (hormis sur quelques kilomètres) établie en déblais du fait de la nature des terrains traversés dans les graves et les zones humides. Des ouvrages d’art de grande hauteur sont d’ores et déjà prévus sur Saint Médard d’Eyrans, Ayguemorte-les-Graves, Beautiran (viaducs de plusieurs centaines de mètres de long dont un sur la vallée du Gât-Mort) qui exposeront les habitants aux bruits aériens et aux vibrations souterraines.
Associé à ces ouvrages la fermeture systématique des passages à niveau existants, la pose d’une clôture continue sur les deux côtés de la LGV, la césure des propriétés, nonobstant le rétablissement partiel de certaines voies de communication (routes), apporteraient des contraintes d’exploitation qui pénaliseraient agriculteurs et viticulteurs.
De surcroit ces dispositifs techniques implantés sur des zones Natura 2000, et à proximité de ZNIEFF[C] ainsi que de sources importantes (Bellefond) pour l’alimentation en eau potable des communes environnantes et de la CUB, constituent une atteinte inadmissible pour les territoires naturels.
Les maires présents confirment ces atteintes, eux qui ont, au sein de la Communauté de Communes de Montesquieu, œuvré pour protéger le milieu naturel en adhérant à la Charte
Natura 2000[D]
et en créant une Charte Paysagère[E].
Bernard Fath pour sa part, dans un reportage diffusé sur une radio locale, reconnaît que les conditions économiques ne sont plus celles des années 60 « la dette de la France est de 1800 milliards d’euros » et qu’il faudrait en tenir compte pour remettre à plat des projets comme le GPSO.
José Bové, très attentif au dialogue qui s’ouvre avec les associatifs présents, confirme la perte des terres agricoles françaises et déplore avec eux la dictature technocratique
qui entoure les politiques décidant des grandes infrastructures (aéroport de Notre Dame des Landes, LGV Lyon-Turin, GPSO…).
Il évoque les recours possibles au titre du non respect des réglementations européennes sur les dossiers environnementaux (loi sur l’eau…) avec l’aide des élus européens d’EELV de la Commission des pétitions européennes.
Les échanges se clôturent autour d’une dégustation des vins du Château Lusseau après une présentation des activités viticoles en culture biologique par Bérengère QUILLIEN de GRANVILLIERS, exemple du dynamisme des viticulteurs en terre des Graves.
Gageons que de telles rencontres soient le ferment d’une prise de conscience des responsables politiques en charge des infrastructures de transports et espérons que la représentante[F] EELV dans la Commission Cuvillier saura exposer les problématiques sociales, économiques et environnementales qui s’y rattachent.
Nous étions présents ce jour auprès de nos adhérents et viticulteurs dans la défense de nos territoires.
Jean-Robert Thomas 2 décembre 2012
[A] Grand Projet du Sud-Ouest étudié par RFF (Réseau ferré de France) qui prévoit la construction d’environ 400 km de LGV entre Bordeaux-Toulouse et Bordeaux-Hendaye
[B] Devenu depuis 2012 expert au sein du Conseil Interprofessionnel du Vin de Bordeaux (CIVB)
[C] ZNIEFF : zone naturelle d’intérêt écologique, faunistique et floristique (cf. http://fr.wikipedia.org/wiki/Zone_naturelle_d'int%C3%A9r%C3%AAt_%C3%A9cologique,_faunistique_et_floristique )
[D] Ayguemorte-les-Graves a adhéré à la Charte Natura 2000 lors de son Conseil Municipal du 2 juillet 2010 (cf. http://ayguemortelesgraves.fr/upload/municipalite/2010-07-02.pdf )
[E] La Charte Paysagère de la Communauté de Communes de Montesquieu est accessible ici : http://www.cc-montesquieu.fr/v2/index.php/content/view/1111201/932/
[F] Cette commission est censée examiner l’utilité publique (rentabilité socio-économique, impact sur l’environnement…) des nombreux projets inscrits dans le SNIT. En son sein siégera Eva Sas – Députée de l'Essonne (Europe Ecologie – les Verts), vice-présidente de la commission des finances.