Le système ferroviaire français en situation critique
Nous avons à de nombreuses reprises démontré que le système ferroviaire français était surendetté, dépassé, au bord de l'asphyxie et ne répondant plus au juste besoin de service pour l'usager.
Les stratégies et la gouvernance erratique de l'Etat Français dans ce domaine depuis des décennies trouvent aujourd'hui leur démonstration quotidienne.
Incidents et accidents ferroviaires, pannes du matériel et du réseau, retards et annulations émaillent chaque jour le fonctionnement du système.
Son endettement récurrent (plus de 40 milliards d'euros à fin 2014), sa stratégie du tout TGV/LGV au détriment du réseau classique et des trains du quotidien, marquent un échec patent de nos ministres successifs au ministère des transports.
Aujourd'hui nous prendrons simplement référence auprès d'un organisme officiel (Observatoire des Politiques et des Stratégies de Transport en Europe – OPSTE) pour montrer l'état alarmant d'un système ferroviaire à l'agonie.
Dans une publication de novembre 2014 « le système ferroviaire français » Antoine BEYER de l'IFSTTAR (Institut français des sciences et technologies des transports, de l'aménagement et des réseaux) examine les causes du naufrage.
Cette étude est accessible par le lien ci-dessous.
Dans son introduction il pointe déjà le mal insidieux qui ronge le système ferroviaire en écrivant :
« La situation du ferroviaire est d’avis unanime préoccupante au plus haut point. Si les avis sont convergent sur le diagnostic, ils ne le sont pas forcément sur les remèdes à adopter, d’autant que le noeud, celui de la dette et de son financement est plus en plus pesant à mesure qu’elle grossit : l’Etat a cherché à s’en défausser, mais avec la suppression de l’écotaxe, le système risque rapidement de se trouver dans l’incapacité d’assurer les transferts minima pour la survie du système. Longtemps, le TGV a tiré le rêve ferroviaire français, aujourd’hui la dette a toute les chances de faire dérailler le système ».
Antoine BEYER évoque tout d'abord la priorité à la rénovation qu'il faut donner pour espérer redresser la situation.
Cette priorité découle notamment des travaux de la Commission Mobilité 21 de juin 2013, et auparavant des rapports Rivier de 2004 et 2012.
L'accident de Brétigny à l'été 2013 a mis en lumière l'épuisement d'un système particulièrement sollicité.
Ce constat vient émerger sur une montagne de dettes qui courent depuis des années. La décision de 1997 fondant deux entités distinctes (SNCF et RFF), sur fond d'obligation du traité de Maastricht qui guidera plus tard l'affichage de la dette de l'Etat, fût un échec.
La réforme ferroviaire de 2014 tente de redynamiser le rapprochement sous un EPIC commun des deux entités de 1997.
Toutefois la dette cumulée est loin d'être effacée et plombe pour longtemps encore les comptes de SNCF.
Le fret ferroviaire ne parvient pas, malgré plusieurs plans de redressements inefficaces, à tenir des objectifs de report modal route/rail. Le résultat d'exploitation, année après année, est dans le rouge.
Le système TGV/LGV longtemps mis en avant comme locomotive du système ferroviaire français montre aujourd'hui ses failles en matière de rentabilité.
Ces diverses attaques dressent un tableau noir du système ferroviaire français que reprenait Gilles Savary dans sa réforme ferroviaire de 2014 :
« Dans son rapport à l’assemblée nationale sur le projet loi adoptée le 4 août 2014, le député Gilles Savary, un des experts du système, dresse un bilan très sévère de la situation : pour lui le système est dans l’impasse, du fait de l’ambiguïté originelle de 1997 rendu obsolète par l’évolution du contexte européen. L’Etat a failli dans son rôle d’autorité organisatrice : question de la dette toujours ouverte, abandon stratégique du fret ferroviaire et une régionalisation inaboutie « .
Antoine BEYER montre aussi que le TGV est descendu de son piédestal et que plusieurs rapports, comme celui de la Cour des Comptes, incitent à réorienter investissements et stratégies vers le transport alternatif à la grande vitesse :
« La rapport préconise, comme avant lui le rapport Duron d’ « insérer le TGV dans une offre tirant parti de l’ensemble des moyens de transport – ferroviaire longue distance alternatif à la grande vitesse (trains à 200 km/h, pendulaires), ferroviaire de proximité, transports collectifs (sur route et en aérien) et coopératifs (co-voiturage, partage, location) – et en levant les restrictions à la concurrence des modes de transport longues distances routiers restreindre progressivement le nombre d’arrêts sur les tronçons de LGV et de dessertes des TGV sur voies classiques ».
Les résultats économiques de SNCF montrent clairement que la rentabilité du modèle actuel est en chute continue depuis des années.
En conclusion Antoine BEYER voit une politique ferroviaire sous contrainte budgétaire, grevée par la dette qui aura du mal à se rétablir sans une refonte profonde de la gouvernance.
Les décisions ministérielles récentes visant à promouvoir encore la construction des trois sous projets du GPSO (aménagements et LGV) montrent une obstination mortelle.